En raison du Grand Débat, j’avais prévu ce mois-ci de ne pas écrire d’éditorial afin de ne pas exprimer de positions sur les sujets débattus. Hélas, l’actualité des derniers jours m’oblige à l’expression. Face à certains agissements qui ne disent pas leur nom, je ne peux rester silencieux. Ces agissements ont tous pour point commun d’être antisémites et de nous renvoyer aux pires heures de notre histoire. Cela je ne peux l’accepter.
Depuis plusieurs semaines, les actes antisémites se multiplient dans notre pays. C’est une réalité. Ces actes antisémites, ce sont des insultes et des agissements insupportables aux abords de la synagogue de Strasbourg en marge d’une manifestation des gilets jaunes. Ce sont des tags intolérables sur les murs de nos villes, sur les vitrines de certains commerces. Ce sont des croix gammées sur le visage d’une grande dame de la République, Simone Veil. Il y a aussi la dégradation des arbres plantés en la mémoire d’Ilan Halimi à Sainte-Geneviève-des-Bois. Et tant d’autres que je ne pourrais citer. Des agissements que nous ne pouvons accepter, des agissements qui n’ont pas leur place dans notre République. Les auteurs de ces agissements doivent être identifiés et condamnés. Mais au-delà, nous devons combattre la montée de cette haine que nous connaissons si bien, que nous pensions derrière nous et qui, malheureusement, ne dit rien de bon de notre société.
Il y a quelques heures, Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, a annoncé que les actes antisémites ont augmenté de 74% en France en 2018. Sur le moment, cette annonce m’a laissé sans voix. Je ne peux pas non plus omettre l’enquête des Inrocks de fin novembre 2018 qui révélait qu’un jeune Français sur cinq ne connaissait pas la Shoah. Mais où allons-nous ? Sommes-nous condamnés à revivre le passé ? La question se doit d’être posée. Nous ne pouvons rester silencieux et le signal d’alarme doit être tiré. Cet antisémitisme ambiant ne doit à aucun moment être toléré ! Par le passé, nous savons où cela nous a conduits en Europe. Aussi, notre devoir est de transmettre les enseignements de l’histoire, d’entretenir le devoir de mémoire, de combattre le moindre acte antisémite et d’en condamner ses auteurs.
Notre pays connaît aujourd’hui une période de questionnements dans un monde en pleine mutation. C’est une réalité. La période que nous vivons suscite des inquiétudes que nous entendons et auxquelles nous devons apporter des réponses. Depuis plusieurs mois, nous connaissons un mouvement citoyen sans précédent. Ce mouvement est parti d’une colère envers notre politique de transition écologique insuffisamment partagée, d’une crise du pouvoir d’achat et de la gouvernance démocratique de notre pays. C’est un fait. Nous y avons apporté des mesures d’urgences sociales sans précédent et ouvert un Grand débat sur plusieurs grands chantiers que nous devons relever tous ensemble. Un cadre démocratique respectueux de nos institutions a été proposé qui doit nous permettre de relever les défis propres à notre époque et permettre à notre pays d’avancer. Depuis plusieurs semaines, plusieurs centaines de milliers de Françaises et de Français participent à ce Grand Débat, en se rendant aux réunions organisées dans tous les territoires ou en partageant leurs contributions sur le site Internet dédié. Ce moment démocratique est unique. C’est une petite révolution dans notre démocratie qui montre que nous pouvons échanger sur la politique de notre pays en dehors des périodes électorales. Et je suis certain que l’intelligence collective de ce moment va nous permettre de construire une société plus juste, plus durable et plus démocratique.
Ce mouvement, ce cri d’une partie de notre peuple, nous l’avons entendu. Nous l’avons pris en compte tant ces messages initiaux étaient une expression politique importante. Mais aujourd’hui, force est de constater que les messages initiaux de ce mouvement se diluent et que d’autres expressions prennent le dessus parmi lesquelles l’anti-républicanisme et l’antisémitisme. Des expressions qui se traduisent par des mots et des violences inacceptables, des agissements que rien ne peut excuser. Des agissements que nous ne pouvons accepter, des agissements qui n’ont pas leur place dans notre République et que nous devons toutes et tous combattre sans relâche.