Déclaré en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population, l’état d’urgence sanitaire est un régime juridique inédit créé à cette occasion qui accorde des pouvoirs exceptionnels au Gouvernement. Avant la pandémie de Covid19, il n’existait aucun régime juridique dans le droit français pour faire face à ce type de situation. Le régime de l’état d’urgence sanitaire a été créé par la loi du 23mars 2020. Aujourd’hui la décision de l’état d’urgence sanitaire est prise par décret en Conseil des ministres pour une durée de deux mois. La prorogation de l’état d’urgence sanitaire au-delà doit être autorisée par la loi. En conséquence, depuis le début de la crise sanitaire, six textes de loi ont été débattus devant le Parlement, comme le présente la frise ci-dessous.
A la suite de l’état d’urgence sanitaire de mars à juillet 2020, le régime transitoire est mis en place du 11 juillet au 16 octobre 2020. Il prend fin par décret avec le rétablissement du deuxième état d’urgence sanitaire déclaré le 17 octobre. La situation épidémique en France ne permettant pas de lever l’état d’urgence sanitaire, il est prorogé par la loi du 14 novembre 2020 jusqu’au 16 février 2021 inclus. Cette même loi a également prorogé le régime de sortie de l’état d’urgence sanitaire au 1er avril 2021.
A sa suite, le projet de loi du 15 février 2021 permet de proroger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin 2021 inclus. Il reporte la caducité du régime d’état d’urgence sanitaire fixée au 31 décembre 2021. Par cette loi, il est donc à nouveau possible de déclarer l’état d’urgence jusqu’au 31 décembre 2021 (au lieu du 1er avril 2021) si cela se révélait nécessaire.
Comment se manifeste l’état d’urgence sanitaire ? Les dispositions relatives à l’état d’urgence sanitaire sont précisées dans le code de la santé publique. L’article L3131-15 liste les restrictions que peut prendre le Premier ministre par décret réglementaire « aux seules fins de garantir la santé publique ». Il s’agit par exemple de restreindre la circulation des personnes et des véhicules, interdire aux personnes de sortir de leur domicile ou encore ordonner la fermeture provisoire d’établissements recevant du public. Le texte précise par ailleurs que ces mesures sont « strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu » et qu’elles sont discutées en prenant en compte l’avis du comité scientifique.
Le projet de loi de sortie de crise sanitaire que nous sommes amenés à discuter dans les prochains jours répond à la nécessité de prévoir un dispositif intermédiaire qui consacre l’atténuation des mesures de police sanitaire. Il permet donc de répondre à une éventuelle reprise épidémique, tout en ouvrant la voie à un rétablissement des règles de droit commun. Il ne s’agit pas d’une prolongation de l’état d’urgence, mais d’une organisation de la sortie de l’état d’urgence, dans le cadre d’une reprise des activités secteur par secteur.
Que contient ce texte ? Reprenant les bases du régime transitoire de l’été 2020, le texte autorise le Premier ministre à prendre des mesures réglementaires pour les établissements recevant du public et les rassemblements sur la voie publique, mais il ne sera plus possible d’imposer le confinement. En ce qui concerne le couvre-feu, un amendement du gouvernement en lien avec les déclarations du Président de la république permet de le maintenir entre 21 heures et 6 heures jusqu’au 30 juin 2021, avec des adaptations locales en fonction de l’évolution des situations épidémiques des territoires, mais sans en allonger la durée.
En ce qui concerne les déplacements, le préfet pourra s’opposer au choix du lieu d’hébergement retenu par un tiers, en cas d’isolement ou de quarantaine. La grande nouveauté du projet de loi à venir concerne le renforcement des mesures sanitaires pour les déplacements à destination ou en provenance du territoire métropolitain ou des territoires ultramarins, avec la création d’un pass sanitaire. Ce dispositif est en train d’être testé pour les déplacements en Corse, sous la forme d’un QR code certifiant de la vaccination ou d’un test négatif. Le pass sanitaire va pouvoir être étendu aux grands rassemblements, dans des modalités en cours de discussion. Il reviendra au Parlement de décider des usages du pass sanitaire et de ses modalités pratiques en vue de la reprise d’événements exceptionnels, en dehors du cadre de la vie quotidienne qui ne pourra en aucun cas être soumis à ce pass sanitaire.
Si la situation épidémique venait à se dégrader, le texte prévoit de réactiver l’état d’urgence sanitaire de manière localisée. Dans les circonscriptions qui comptent moins de 10% de la population nationale, il pourrait être déclaré pour deux mois maximum.
Pour respecter les échéances électorales à venir, le texte prévoit également les modalités d’organisation dans les meilleures conditions les élections départementales et régionales en facilitant les opérations de vote et en assouplissant les exigences avec la possibilité de voter en extérieur notamment. Plusieurs mesures d’accompagnement seront prolongées durant cette période transitoire, notamment dans le domaine judiciaire en matière non pénale. Les organes délibérants continueront à privilégier les communications électroniques pour les réunions et les conseils d’administration.
Pour limiter les licenciements et assurer une continuité économique, des aides financières seront prolongées et adaptées pour les milieux de la culture et du sport et le plafond de jours de congés pouvant être imposés passe de six à huit jours. D’autre part, le projet de loi habilite le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnances en matière d’activité partielle et de droit aux allocations chômage, pour accompagner les commerçants dans cette période difficile.