En ce mois de septembre, je tiens tout d’abord à vous souhaiter une belle rentrée et une année pleine de projets, de découvertes, de réussites, d’engagements aussi. Je salue tout particulièrement les élèves et les étudiantes et étudiants qui retrouvent ces jours-ci les bancs de l’école ou des universités, l’ensemble des équipes éducatives qui les accompagnent et les forment au quotidien pour préparer leur avenir. À quelques jours des traditionnelles journées des associations, j’exprime également une pensée chaleureuse et reconnaissante pour toutes celles et tous ceux qui sont engagés à travers nos associations dans la vie et les solidarités de nos territoires et de notre société. Par votre engagement, chaque jour, vous contribuez à notre vivre ensemble et j’espère que les nouvelles vocations bénévoles et militantes seront nombreuses cette année. Notre démocratie en a grandement besoin.
J’aurai pour ma part le plaisir de vous retrouver dans les jours qui viennent à l’atelier législatif, dans nos villes ou à l’Assemblée nationale pour échanger sur les actualités de la rentrée et les chantiers législatifs qui sont devant nous, sur vos préoccupations personnelles aussi. Ces moments seront aussi l’occasion de revenir sur les défis climatiques, sociaux, économiques et internationaux auxquels nous sommes confrontés et sur l’initiative politique lancée par le président de la République Emmanuel Macron. Cette initiative vise à travailler sur la rénovation de nos institutions démocratiques et le renforcement de notre cohésion sociale. Dans une époque où le débat politique est devenu cacophonique, brutal et bien souvent caricatural, cette séquence est la bienvenue. Nous avons besoin d’une certaine forme de cohésion politique nationale sur certains sujets relatifs au fonctionnement de notre société et de notre démocratie. C’est une nécessité pour faire vivre le débat, avancer notre pays, et le sortir du pessimisme dans lequel il est enfermé depuis trop longtemps.
En cette rentrée, quatre sujets retiennent tout particulièrement mon attention. Le premier concerne les enseignements que l’on doit tirer des événements que nous avons connus au début de l’été suite à la mort du jeune Nahel, tué par un policier à Nanterre. Les quelques soirées d’émeutes que nous avons connues n’avaient pas réellement de sens politique et étaient profondément désorganisées et violentes. Les agissements commis par quelques-uns durant cette période sont inacceptables. Ces événements que nous avons vécus doivent cependant nous inviter à nous interroger et à regarder avec lucidité la réalité de nos territoires urbains et de nos banlieues dont on ne parle que trop peu aujourd’hui. Les difficultés sociales y sont importantes, l’accès aux services publics, à la santé de plus en plus difficiles. Le taux de chômage y est encore élevé, l’insécurité, les discriminations sont une réalité du quotidien tout comme le recul de la mixité sociale et l’accroissement de la place de la religion dans l’organisation de la vie locale. Même si elle ne s’est pas manifestée durant la crise des gilets jaunes où durant les mouvements sociaux contre les réformes des retraites, la tension et la colère couvent depuis plusieurs années dans ces territoires. Au-delà des politiques de rénovation urbaine qui sont conduites depuis près de vingt ans maintenant, nos « quartiers » dits populaires et de banlieues ont besoin avant tout de voir la présence des services publics, la présence humaine de professeurs, de médecins, de policiers, d’accompagnateurs sociaux, de personnels de la petite enfance, de commerçants de proximité aussi, considérablement renforcée. Tant que notre pays aura plus d’enseignants par habitant dans la Creuse (7,16 enseignants pour 100 élèves) qu’en Val-de-Marne (5,44 enseignants pour 100 élèves), il ne faudra pas s’étonner du mal-être qui peut y régner parfois. Il est urgent également de permettre le désenclavement de ces régions en développant les transports en commun et les mobilités actives. Cela passera aussi par le développement d’une politique ambitieuse en matière d’égalité des droits entre les femmes et les hommes. Nous ne pouvons plus accepter que par endroit les femmes soient presque bannies de l’espace public. Nous devons enfin renforcer encore notre lutte contre les réseaux mafieux qui gangrènent certains quartiers avec le trafic de drogue et de traite humaine. Les difficultés réelles que connaissent ces territoires sont le fruit d’inégalités structurelles et de sous-investissements chroniques depuis plusieurs décennies qui ne peuvent être traités par la caricature et le rejet de l’autre.
Le deuxième sujet concerne le fonctionnement de nos services publics et tout particulièrement notre santé et notre école. Depuis maintenant six ans nous mettons tout en œuvre pour revaloriser les rémunérations de nos personnels de santé et de nos professeurs, nous travaillons au renforcement de l’attractivité des carrières, à l’amélioration du fonctionnement des services aussi. À titre d’exemple, en cette rentrée, nous tenons l’engagement que nous avions pris lors des dernières élections nationales que plus aucun enseignant n’ait une rémunération inférieure à 2000 euros nets par mois (nous augmentons également tous les professeurs de 100 euros par mois et nous mettons en place une hausse de rémunération qui peur aller jusqu’à 500 euros net par mois pour celles et ceux qui s’engagent volontairement dans des missions supplémentaires). Mais, après des décennies de sous-investissements dans ces deux secteurs, force est de constater qu’il faut aller encore plus loin tant l’accès à la santé est de plus en plus compliqué pour nombre de nos concitoyens, tout particulièrement pour nos concitoyennes d’ailleurs, et que nombre de familles continuent de fuir une école publique qui connaît un réel mal-être et des difficultés de recrutement. Cette situation, nous ne pouvons l’accepter et elle doit être au cœur de nos réflexions actuelles. Il faudra aborder ces sujets sans tabous.
Au moment où nous rentrons dans la préparation des lois des finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2024, le troisième sujet de réflexion que je tiens à vous partager concerne notre capacité à financer notre modèle social et nos investissements pour réussir la transition écologique, dans une période où la maîtrise de notre dette redevient une priorité absolue. Nous devons trouver les outils budgétaires qui nous permettent de garantir la réalisation des investissements nécessaires pour rénover nos logements et nos bâtiments publics, pour développer nos politiques de mobilités décarbonées, pour revégétaliser nos espaces urbains et transformer notre modèle agricole, pour sortir du modèle de consommation individualiste dans lequel nous sommes en développant une réelle économie circulaire de proximité. À côté de ces investissements, nous devons assurer le financement de nos services publics dans un moment où il est nécessaire que nous les modernisions et que nous augmentions à la fois les recrutements et l’attractivité des carrières dans l’éducation nationale, la santé, la justice et la sécurité intérieure. Dans ce cadre, je pense que nous devons avoir un débat démocratique serein sur la maîtrise de la dette et de la dépense publique d’un côté, sur la citoyenneté et le niveau des impôts en France de l’autre. Une conviction, nous devons sortir de l’opposition politique entre ceux qui prônent la gratuité et ceux qui prônent l’exonération. Au regard de la situation que nous vivons, ces positionnements ne sont pas sérieux. Nous devons aussi assumer une politique plus forte de bonne gestion des deniers publics.
Le dernier sujet de réflexion que je vous partage en cette rentrée concerne la place du numérique et des réseaux dits sociaux dans notre société et la nécessité de réguler ces outils qui viennent en partie menacer la cohésion de nos sociétés et la vie de nos démocraties. Alors même que la nouvelle réglementation européenne se met en place et que nous débutons à l’Assemblée nationale les discussions sur le projet de loi sur la régulation de l’espace numérique, ce débat doit commencer à irriguer toute notre société. Ce qui n’est pas accepté dans l’espace public ne doit pas l’être dans l’espace numérique. Par ailleurs, le développement du numérique, qui présente de nombreux avantages, ne doit pas non plus détruire les liens sociaux humains qui sont eux bien réels. Nous devons sortir de l’enfermement matériel, parfois intellectuel, que crée le numérique qui fait que bien souvent l’on ne fait plus attention à la société dans laquelle on vit en collectivité. Membre de la commission spéciale sur la régulation de l’espace numérique, je reviendrai plus longuement sur ce sujet dans les jours qui viennent.
Ces sujets de réflexion ne sont pas exhaustifs mais je tenais à vous les partager en cette rentrée et à vous poser une question : et vous, quelles réflexions, questionnements ou pensées vous habitent en cette rentrée ? J’aurai bien entendu plaisir de continuer à échanger avec vous. En espérant que vous avez passé un bel été, je vous dis à bientôt,
Bien respectueusement,
Guillaume Gouffier Valente