Du fait de leur toxicité pour les insectes pollinisateurs, les produits néonicotinoïdes ont été interdits progressivement depuis les années 1990 jusqu’à une interdiction totale en France le 1er septembre 2018 en vertu de la loi « Biodiversité » de 2016. Des exceptions ont néanmoins été prévues jusqu’au 1er septembre 2020 afin de permettre aux acteurs concernés de s’adapter et d’appliquer les mesures transitoires.
En plus de ce projet de loi, le Gouvernement a annoncé renforcer les programmes de recherches d’identification d’alternatives pour les cultures betteravières, une indemnisation pour les pertes importantes liées à cette crise. Le Gouvernement a également nommé un délégué interministériel à la filière sucre pour coordonner la mise en œuvre du plan d’actions.
L’examen en commission a permis plusieurs avancées apportant des garanties bienvenues et essentielles après que le président du groupe Larem Christophe Castaner a exprimé de très fortes réserves sur le projet de loi initial :
Si cette loi a été présentée par le gouvernement et qu’elle a été adoptée ce mardi, c’est parce que la filière betteravière connait de grandes difficultés qui mettent en danger notre souveraineté nationale en matière de production de sucre. La maladie de la jaunisse a fait perdre jusqu’à 50% de la culture de la betterave sur certains territoires et cette crise fait craindre une disparition de toute une filière économique ainsi que les dizaines de milliers d’emplois qui en dépendent. Ces difficultés je les entends bien entendu et je ne souhaite pas que l’on se retrouve dans l’obligation d’importer notre sucre depuis d’autres pays qui ne respectent absolument pas les normes environnementales qui sont les nôtres et qui ne s’engagent pas pour le moment dans la sortie des pesticides.
Néanmoins, je suis profondément contrarié par cette mesure que nous adoptons aujourd’hui tant elle fait suite à des dysfonctionnements qui auraient pu être anticipés et évités. L’interdiction des produits contenant des néonicotinoïdes n’est ni une nouveauté ni une surprise. Nous avions les moyens d’être totalement prêts pour sortir entièrement des néonicotinoïdes dès cette année. La loi ayant été votée en 2016, la filière betteravière aurait dû avoir le temps d’investir dans des solutions alternatives aux produits neurotoxiques, de s’adapter en douceur afin de répondre aux exigences européennes et nationales. Par manque de volonté des quelques entreprises et agriculteurs concernés, par manque de contrôle de la part du Parlement et de vigilance du Gouvernement, rien n’a été fait ou pas suffisamment, et nous nous retrouvons une nouvelle fois à devoir débattre de ce sujet. Et ainsi, nous nous retrouvons à devoir légiférer en urgence et un peu n’importe comment pour proroger certaines exceptions avec le risque de rouvrir le débat de manière plus générale.
Le suivi de ce dossier au cours des dernières années présente de nombreuses défaillances, des défaillances qu’il nous faut aujourd’hui analyser. Tous les acteurs qui ont eu à traiter ce dossier supportent une part de responsabilité. Je n’ai donc pour ma part pas pu adopter ce projet de loi sans rien dire, sans manifester mon mécontentement et exprimer un message de vigilance forte quant au suivi de la transformation de la filière betteravière dans les années qui viennent. Étant membre de la majorité présidentielle, je me suis donc abstenu.
La réintroduction de ces produits toxiques aura des impacts réels et concrets que nous n’ignorons pas. Ces produits sont présents pendant plus de vingt ans dans les sols, touchent toute la faune et la flore aux alentours et se retrouvent jusque dans notre alimentation. Des solutions alternatives existent comme la réimplantation des haies sur les surfaces agricoles, l’introduction de prédateurs pucerons ou encore des semis plus tardifs. Elles demandent du temps et de l’investissement mais sont bénéfiques. C’est ce chemin que nous devons entièrement prendre aujourd’hui. Je sais qu’il est exigent mais il y a urgence.