Devons-nous réformer notre système de retraite ? Oui. Devons-nous réduire cette réforme à un ajustement uniquement paramétrique ? Non. Une telle démarche serait socialement injuste et budgétairement inefficace sur le long terme. Devons-nous transformer notre système de retraite en un système universel ? Oui, je le pense et je continue de défendre cette position progressiste.
Notre système de retraite est devenu au fil des années, l’ancrage définitif de toutes les inégalités structurelles de notre société, sans que personne ne s’en émeuve réellement. Il s’agit en effet d’un système dans lequel la pension moyenne des femmes est 42% inférieure à celle des hommes parce qu’elles connaissent des carrières hachées en faisant le choix d’élever leurs enfants ou en n’ayant pas d’autres choix que d’exercer des métiers difficiles et souvent précaires. Un système dans lequel celui qui a fait des études et eu une carrière linéaire ascendante part plus tôt à la retraite avec une pension et une espérance de vie plus élevée. Aujourd’hui, ce système aux quarante-deux régimes est devenu totalement illisible en plus d’être structurellement déséquilibré. Il est devenu au fur et à mesure des années, injuste et déconnecté des réalités de notre société, qui demande alors des réformes paramétriques tous les cinq ans. Même si nous nous y sommes habitués, nous ne devons plus l’accepter.
C’est pourquoi nous devons aller vers un système universel de retraite dans lequel les principes et les règles seront les mêmes pour chacune et chacun. Je défends ainsi un système qui prenne mieux en compte les différences de parcours de vie et de carrière. Il doit être capable de s’adapter aux évolutions sociales, à la transformation des métiers, des parcours professionnels et de l’environnement économique, Ce projet, c’est celui que nous avons tenté de construire en 2020 et qui a été interrompu par la pandémie du Covid-19. Le constat que nous faisions alors n’a pas changé.
Le système universel vise à pérenniser notre système de retraite par répartition qui repose sur la solidarité intergénérationnelle en le rendant démocratiquement plus lisible et plus transparent, en garantissant les mêmes droits à tous nos concitoyens et en supprimant les régimes spéciaux. Il ne vise en aucun cas à préparer la mise en place d’un système de retraite par capitalisation. Au contraire, il renforce la solidité budgétaire de notre système actuel en réduisant en profondeur les inégalités pour permettre à nos concitoyens d’accéder à l’intégralité de leurs droits. Il nous permettrait également de réduire les nombreux effets anti-redistributifs du système actuel et de mieux prendre en compte la pénibilité de certains métiers, les mobilités professionnelles, la construction progressive des fins de carrières, la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes et l’augmentation du revenu minimal des pensions.
Depuis trop longtemps notre pays s’est habitué à certaines injustices et a arrêté sa quête d’émancipation et de progrès. Nous ne pouvons continuer plus longtemps de ne pas lutter contre certaines inégalités dans le seul but de ne pas perturber des ordres établis. Alors oui, ce projet demeure exigeant et difficile. Mais nous devons continuer de le porter. Il s’inscrirait dans notre marche vers l’universalité des droits, vers la construction d’une République plus juste, plus solidaire, plus fédératrice et plus fraternelle.