En guise de propos liminaire, Antoine Foucher et Anne Broches ont dessiné les grandes tendances et évolutions du monde du travail en France. Les recrutements en France n’ont jamais été aussi difficiles qu’en 2022. 60% sont jugés difficiles, un record, et ce quelque soit la taille des entreprises, le territoire concerné, ou même le secteur.
En conséquence, le taux d’emplois vacants en France atteint un niveau inédit (près de 2,5%) alors que, paradoxalement, nous n’avons jamais créé autant d’emplois et d’entreprises. En conséquence, notre taux de chômage est au plus bas depuis 15 ans. Il n’y a jamais eu autant de personnes au travail en France (68,3% des Français en 2021).
Le niveau de démission augmente et a atteint un niveau historique (près de 2 millions par an). Un phénomène que nous avions déjà connu il y a vingt ans. Cependant, les salariés ne démissionnent pas pour faire autre chose que travailler : 8 personnes sur 10 sont à nouveau en emploi dans les six mois qui suivent leur démission, ce qui explique l’augmentation du taux d’emploi.
Il n’y a pas de transfert massif de main d’oeuvre d’un secteur à un autre : le départ de salariés d’un secteur est largement compensé.
Alors, le rapport au travail des Français a-t-il changé ? Les enquêtes d’opinion indiquent trois tendances :
• Les salariés n’ont jamais été autant en quête de sens : 40% des salariés envisageraient de quitter leur emploi pour un emploi davantage porteur de sens (notamment les jeunes);
• La transition énergétique est de plus en plus mise au coeur du travail : un salarié su trois considère que l’impact positif sur l’écologie est le ce qui donne un sens à leur travail;
• Une recherche d’autonomie : 76% des salariés en chercheraient plus dans leur travail.
Au-delà, les difficultés de recrutement tiennent souvent à l’entreprise elle-même (qualité de la gestion RH et du management, image de l’entreprise, etc.).
Une réflexion pourrait être conduite autour de la forme du contrat de travail, mais aussi autour des salaires avec un risque majeur de dégradation du pouvoir d’achat des salariés. Depuis 10 ans, les salaires et le pouvoir d’achat progressent de moins en moins et risquent de continuer à diminuer. Il s’agit dont de réfléchir à la façon dont il est possible de diminuer la tension salariale et les conflits de répartition de la valeur.
Pour cela, l’ensemble des acteurs, y compris sociaux doivent être prêts à répondre à ces enjeux.
Au-delà, d’autres pistes peuvent être explorées telles que le dividende social, une meilleure prévention des risques au travail, une meilleure conciliation de la vie personnelle/ professionnelle.
Le premier est l’égalité femmes-hommes. Les écarts de salaire, à temps de travail égal et métier égal, sont de 5,3%. La mise en place de l’index de l’égalité professionnelle a déjà permis de faire reculer cette inégalité de 4 points en deux ans, mais il faudra poursuivre ce combat.
Le second concerne les enjeux de formation. Au-delà de la formation initiale, un enjeu majeur réside dans le parcours du salarié et une réflexion pourrait être conduite sur l’application du Compte personnel de Formation (CPF), dont la première réforme avait permis de doubler en deux ans le nombre de salariés l’utilisant. Il s’agit aussi de permettre plus facilement la reconversion professionnelle, notamment des seniors.
Les Français travaillent moins que les européens ? Au cours de l’année, la durée de travail des Français est similaire à celle de ses voisins, mais ils débutent leur carrière plus tard et la terminent plus tôt, réduisant ainsi leur durée de travail tout au long de la vie.
Le report de l’âge légal de départ à la retraite pousse les seniors à travailler plus longtemps et augmente le taux d’emploi ? Oui. On observe qu’un âge légal de départ à la retraite repoussé permet d’augmenter le taux d’emploi et d’activité des seniors, pouvant notamment réduire la propension de recours au cumul emploi-retraite.
La prochaine réunion à l’atelier législatif aura lieu en février sous la forme de “Questions au député”.