Ce texte part du constat que la France dispose d’un arsenal règlementaire conséquent contre les discriminations mais que pour autant, le droit en l’état actuel, est inopérant : il n’y a eu aucune condamnation pénale en matière de discrimination en France en 2020. Les faits de discriminations en termes d’accès au travail, au logement, à l’université, aux biens et services publics se font souvent sur la base de l’origine, de l’âge ou encore de l’adresse de domicile du candidat.
Pour y remédier, une première étape a été franchie avec la création de la plateforme AntiDiscriminations.fr par le Gouvernement en février 2021 qui a provoqué une hausse des saisines de 26 % entre 2020 et 2022. Dans cette continuité de libération de la parole, cette proposition de loi vise ainsi à développer le testing pour identifier les pratiques discriminatoires des entreprises et des administrations et permettre un vrai droit à la réparation pour les personnes qui en sont victimes.
Il existe deux sortes de tests :
La proposition de loi prévoit la création d’un service placé sous la tutelle de la Première ministre, au sein de la DILCRAH (Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT) qui aura pour mission de lutter contre toutes les formes de discriminations. La DILCRAH devra notamment réaliser des tests statistiques sur des entreprises ou des administrations selon des orientations définies par le Gouvernement, après consultation de la Défenseure des droits. Concernant la réalisation de tests individuels, la DILCRAH sera en mesure d’informer les citoyens intéressés s’ils s’estiment victimes de discrimination. Les débats se sont cristallisés sur ce dernier point, notamment à la suite de la publication de l’avis de la Défenseure des droits concernant le risque de concurrence entre les différents acteurs de la lutte contre les discriminations. Ainsi, la réalisation des tests individuels par la DILCRAH se fera durant une expérimentation de 3 ans avant d’envisager sa pérennisation.
Pour permettre à la DILCRAH de mener sa campagne de testing, un amendement au Projet de loi de finances pour 2024 a été déposé par le groupe Renaissance pour augmenter les moyens de cette administration à hauteur de 3 millions d’euros.
Un comité des parties prenantes au sein de la DILCRAH aura pour principale mission d’organiser le dialogue entre les différents acteurs et d’élaborer la méthodologie générale en matière de conception de tests anti-discriminations. Comité indépendant, ce dernier sera composé notamment de représentants des organisations syndicales et patronales, de parlementaires, d’experts de tests statistiques, d’un membre de la Défenseure des droits et d’associations de lutte contre les discriminations.
Ce comité se prononcera également sur les suites à donner lorsque le test réalisé révèle une situation de discrimination. Le but est d’éviter le ressentiment des entreprises, leur méfiance envers les tests et donc la contestation des résultats. Cette situation serait contre-productive et ne permettrait pas de changer les comportements. En cas de test positif, le texte prévoit ainsi une procédure privilégiant le contradictoire pour trouver un accord d’abord, avant de prononcer une sanction. L’entreprise ou l’administration est informée des résultats du test et a la possibilité de définir un plan de lutte efficace contre les discriminations. En cas d’inaction ou d’inefficacité du plan de lutte mis en place, le texte donne une base législative et une sécurité juridique au dispositif du « name and shame ». Les personnes visées s’exposent ainsi à la publication des résultats du test. Enfin, les entreprises risquent aussi une sanction financière à hauteur de 1% de la masse salariale et jusqu’à 5% des gains et rémunérations pour les entreprises récidivistes. Enfin, un contrôle a posteriori des personnes morales visées sera réalisé les années suivantes pour évaluer leur engagement dans la lutte contre les discriminations.