Il s’est écoulé un an, jour pour jour, depuis la courageuse décision de la députée Sandrine Josso de médiatiser son affaire pour porter ce combat politique au nom de toutes les victimes de soumission chimique. Jeudi, nous étions 154 à suivre ce cycle de formation, de sensibilisation et de réflexion pour contribuer à améliorer le circuit de prise en charge médicale, psychologique et judiciaire.
La soumission chimique est un mode opératoire qui consiste à administrer à l’insu d’une personne des substances psychoactives à des fins criminelles ou délictuelles. L’augmentation exponentielle de 69,1% des signalements en 2022 est à mettre en perspective avec le mouvement européen de libération de la parole sur les agressions facilitées par les substances (AFS). Néanmoins, nos représentations collectives, conjuguées aux discours dissuasifs culpabilisateurs du corps médical et judiciaire, persistent et freinent les dépôts de plainte. La soumission chimique ne se réduit pas au milieu festif, aux boissons alcoolisées, aux jeunes femmes ou encore à ladite « drogue du violeur » (GHB). Dépasser ces idées reçues est indispensable pour traiter de la soumission chimique comme un véritable enjeu de santé publique.
L’enquête prospective annuelle sur la Soumission Chimique de l’ANSM révèle que les auteurs sont souvent connus des victimes (43,3%), que l’administration de substances s’avère dans le milieu conjugal ou intrafamilial, notamment pour les enfants (46,7%) ou encore que les médicaments sédatifs sont majoritairement incriminés (56,7%). Cette enquête a pour objectif de proposer la modification des conditions de prescription et de dispensation des médicaments impliqués, ou d’en modifier les formulations galéniques pour en sécuriser l’usage.
Rompre avec l’isolement des victimes revient également à rompre avec l’errance des professionnels de santé et des autorités judiciaires qui les accompagnent et les orientent vers les bons interlocuteurs. À ce titre, nous avons pu avoir l’expérience de l’Unité Coralis de la Maison des Femmes qui assure un suivi médical sur le long cours et apporte une aide juridictionnelle et psychologique. Aujourd’hui, le parcours d’attestation de preuves demeure toujours une course contre la montre pour les victimes qui ont besoin d’interventions de dépistage précoces et accessibles, sans conditions de ressources.
Lancée par le Centre d’Addictovigilance de Paris en mars 2024, l’étude GSC offre la possibilité à 200 victimes suspectant une soumission chimique, ayant ou non déposées plainte, d’accéder gratuitement à des analyses capillaires. Par-delà cette mission d’intérêt général, cette étude permet de discuter de l’intérêt d’une systématisation des analyses de cheveux pour faire avancer les affaires judiciaires autant que la recherche scientifique sur les agents de soumission chimique.
Le corps médical et judiciaire constitue un maillon indispensable dans la judiciarisation des affaires de soumission chimique. Pour repérer ce modus operandi, une formation éclairée, aussi bien dans le cadre de leur cursus que dans la formation continue, est fondamentale. La plateforme nationale de téléconseil du CRAFS (Centre de Références sur les Agressions Facilitées par les Substances) s’attache à limiter les dommages causés par l’errance thérapeutique (syndrome de stress post-traumatique, tentatives de suicide, rumination anxieuse, etc.) par des formations à destination des professionnels à large échelle et dans tous les secteurs d’activité (professionnels de santé, police/gendarmerie, avocats, magistrats, établissements de nuit, associations d’aide aux victimes, association de réduction des risques, etc.).