Écrire dans cette période politique instable n’est pas chose simple. L’exercice n’en reste pas moins utile pour tenter de poser des constats et dresser des perspectives, pour construire une analyse, la partager et la mettre en débat. Après la dissolution, quelles que puissent être les opinions des uns et des autres, la censure du gouvernement de Michel Barnier a été un moment douloureux pour notre pays. Nous n’avions pas connu un tel choc politique depuis 1962 et la censure du gouvernement de Georges Pompidou. Le choc n’en demeure pas moins politique et nous ne devons pas céder à la peur du chaos. Notre pays connaît un moment de crise politique comme il n’en a pas connu depuis longtemps, mais en aucun cas il n’est en train de s’enfoncer. Ces crises, nous avons toujours su les surmonter. Nous allons surmonter celle-ci.
Ces dernières semaines, dans un tel moment, j’ai eu l’occasion de plaider à plusieurs reprises au sein de mon groupe à l’Assemblée nationale pour que notre famille politique ait des positions claires dans le cadre des discussions auprès des autres formations politiques. Je vous les livre ici et je suis à votre disposition pour échanger dessus. De manière globale, d’abord, je partage l’analyse posée par la philosophe Gabrielle Halpern dans son livre Créer des ponts entre les mondes sur le fait que nous devons répondre aujourd’hui à une triple réflexion sur la gouvernance de nos organisations, le travail et le rapport au travail, enfin, la revivification de notre vivre ensemble au cœur de laquelle je place notamment l’égalité entre les femmes et les hommes. Ces sujets doivent nous inviter à repenser notre société et la nature des liens qui existent entre ses différents acteurs. Nous ne pouvons plus fonctionner avec une logique de compartimentation de notre société. Une logique de cases. Nous devons décloisonner les rapports entre les uns et les autres. Nous devons poser les bases d’une société qui associe et rassemble, et non d’une société qui caricature et divise. C’est, d’une certaine manière, un préalable à toute action. J’espère que nous, les représentants politiques, nous arriverons enfin à être au rendez-vous de cet enjeu. Cela nous demandera de dépasser les intérêts partisans ou individuels. Cela nous demandera aussi de sortir de la culture de la petite phrase et de l’invective permanente.
Ensuite, je pense que nous devons nous concentrer sur certains enjeux primordiaux de notre époque et non définir l’agenda parlementaire en fonction du buzz du moment. Pour ma part, cinq sujets m’apparaissent majeurs dans l’immédiat. La planification écologique, la lutte contre les narcotrafics, la relance de notre industrie et le renforcement de l’attractivité de notre fonction publique, la poursuite de nos politiques de renforcement de nos ministères régaliens dans lesquelles j’inclus l’Éducation nationale et la Santé, l’amélioration de la législation sur la fin de vie. Sur ces sujets, nous pouvons avancer. Enfin, aussi difficile soit la période politique que nous vivons, aussi éparpillée soit la représentation nationale, le sujet de la maîtrise de nos comptes publics et du financement pérenne de notre modèle social doit être abordé. Sur ce dernier sujet, nous devrons changer de méthode si nous voulons que chacun puisse sortir de ses dogmes ou de ses lignes rouges. La proposition avancée par certains de mettre en place une grande conférence sociale ou une conférence de financement doit être regardée de près. J’y suis pour ma part très favorable.
Les mois que nous venons de vivre ont été difficiles sur un plan politique. Cela est nature à créer de la tension et des inquiétudes que je comprends. De cette période nous devons tirer un certain nombre d’enseignements sans pour autant nous enfermer dans ce travail d’inventaire. Nous commettrions alors une erreur qui nous condamnerait à l’immobilisme le plus total. Bien au contraire, au moment où François Bayrou devient Premier ministre et où un nouveau gouvernement doit prendre ses fonctions, la priorité doit être de nous concentrer sur la suite et sur ce que nous sommes en capacité de faire, comment nous pouvons le faire et avec qui. Ni optimistes, ni pessimistes, nous devons être déterminés à rassembler et à agir pour les Françaises et les Français, pour l’unité de notre pays et son avenir.