D’une ampleur inédite, « The Next Wave » fournit un récit détaillé des trajectoires financières de plus de 270 acteurs anti-droits et extrémistes religieux en Europe, retraçant leur accès croissant au pouvoir politique, leur professionnalisation, leur mise en réseau internationale et — dans certains cas — leur prise de contrôle d’institutions entières, de partis politiques et même d’États. Le rapport révèle également de nouvelles stratégies, telles que la production de savoirs idéologiquement orientés, la création d’infrastructures de services anti-genre, et l’essor de cabinets d’affaires publiques et de structures de la société civile secrètement dirigés par des hiérarchies religieuses. Il est à noter que la France occupe la 2ème place des pays dans lesquels ces mouvements obtiennent le plus de financements.
Quelques mots sur le rapport
Une nouvelle alliance d’extrémistes religieux, de populistes d’extrême droite et de bailleurs de fonds oligarchiques est en train de remodeler la politique européenne. The Next Wave décrit cet effort stratégique et discret visant à redorer l’extrémisme religieux pour l’intégrer dans la gouvernance dominante, en utilisant les médias, les ONG, les partis politiques et les institutions publiques.
Soutenue par des fortunes privées et légitimée par des financements publics, cette mouvance orchestre une transformation autoritaire de long terme, sous couvert de tradition et de bienveillance. Ce projet met au jour l’architecture financière, politique et idéologique de The Next Wave, offrant à la société civile les moyens de reconnaître, résister et contrer son influence croissante. Le soutien philanthropique est essentiel pour perturber cette infrastructure émergente et défendre la démocratie pluraliste.
Ma préface traduite de l’anglais, en français
La « prochaine vague » n’est pas à venir, elle est déjà là. Il s’agit d’une progression d’idées religieuses radicales, autrefois marginales, vers le cœur du pouvoir politique, où elles influencent de plus en plus les lois et le débat public européen et international. Ce retour en arrière antiféministe et antigenre profite de la montée en puissance d’hommes forts autoritaires et de populistes d’extrême droite, qui capturent les institutions démocratiques pour les vider de leur substance.
L’argent est à l’origine de ce mouvement. Il est disponible en quantités, stratégiquement placé et camouflé. Il est dans les mains d’une nouvelle classe oligarchique, composée de magnats de la technologie, d’élites industrielles et d’aristocrates fortunés, qui finance un vaste projet d’ingénierie sociale. Ils ne cherchent pas seulement à renforcer leur influence, mais aussi à démanteler des décennies de progrès social qu’ils perçoivent comme une menace. Leurs méthodes sont subtiles et dévastatrices. Ils banalisent une idéologie religieuse extrémiste en la présentant comme une vision traditionnelle et laïque fondée sur la famille et l’ordre— rendant ces idées acceptables aux yeux du public et de la classe politique, sans dévier de leur objectif.
La force de ce mouvement réside dans sa capacité à former des coalitions et des réseaux de soutien. Partout en Europe, des réseaux parallèles de contrôle se mettent en place. Des organisations non-gouvernementales, forgées par l’Église, se font passer pour des membres de la société civile : des « services » anti-genre présentés comme des soins, des think-tanks d’extrême droite déguisés en instituts de recherche, etc. Médias, partis politiques spécialisés, réseaux éducatifs élitistes — ces infrastructures montrent que le mouvement connaît une expansion et une professionnalisation qui va bien au-delà du simple lobbying.
Les algorithmes des réseaux sociaux non régulés ont amplifié ces idées, autrefois marginales, en les diffusant à un public plus large que jamais, en particulier auprès des jeunes hommes et des garçons. Des influenceurs misogynes tentent de séduire la nouvelle génération avec une rhétorique pseudo-traditionaliste, ce qui a donné un nouvel élan au mouvement anti-genre. Il est désormais clair que l’ampleur de la radicalisation en ligne chez les adolescents est bien plus importante que ce que nous avions imaginé. Il est urgent d’agir si nous ne voulons pas que les extrémistes bruyants éclipsent les voix de ceux qui se soucient de l’inclusion et de l’égalité.
Toutefois, la politique constitue l’épicentre du projet anti-genre. Les adeptes de cette idéologie religieuse mettent en œuvre des stratégies minutieuses et de long terme pour conquérir le pouvoir, en utilisant une rhétorique moralisatrice pour se consolider. Ils nouent des alliances opportunistes avec les autres sphères autoritaires, dans le but de défier et déstabiliser une société tolérante fondée sur les droits. Lorsque ces alliances populistes et radicales aboutissent, les femmes et les minorités sont les premières à ressentir les conséquences de cette stratégie politique de contestation de leurs droits.
La légitimation politique permet aux extrémistes religieux d’interférer dans la répartition des fonds publics. Une fois au pouvoir, les acteurs anti-droits débloquent de nouvelles sources de financement public. Là où l’extrême droite gouverne, les subventions publiques sont redirigées vers des entreprises religieuses privées, permettant à des programmes extrémistes de prospérer sous couvert de prestations de services, de préservation culturelle ou d’éducation. Ce qui est parfois présenté comme une défense de la liberté religieuse ou une réduction des dépenses de l’État constitue trop souvent une attaque contre les femmes et les minorités.
La « prochaine vague » est une contre-révolution méthodique et organisée qui se repend partout en Europe. Tout en se présentant comme un retour à des valeurs traditionnelles d’un passé imaginaire qui n’a jamais existé, elle représente une réelle prise d’otage de l’avenir. Ce rapport est une analyse approfondie et vertigineuse de la manière dont tout cela se produit et il propose des solutions précieuses pour garantir la pérennité de nos droits durement acquis.
Vous retrouverez ici le lien vers le rapport anglais en entier. Une version traduite en français paraîtra dans les prochains mois.