Les dernières années ont vu de nombreuses avancées enrichir ces droits des femmes face aux violences sexuelles et sexistes. Le 25 novembre 2017, à l’Élysée, le président de la République proclamait l’égalité femmes-hommes grande cause nationale de son quinquennat. Dans le sillage du mouvement Me Too, puis avec l’organisation du Grenelle des violences conjugales, pas moins de trois nouvelles lois et des centaines de mesures publiques sont venues renforcer depuis 2017 les dispositions déjà en vigueur.
La France s’est dotée ces dernières années d’un arsenal législatif très complet permettant de mieux protéger les femmes face aux violences sexistes et sexuelles. Pourtant, l’immense majorité des droits des femmes restent ignorés. De la verbalisation du harcèlement de rue à la saisie des armes du conjoint violent, de l’allongement des délais de prescription pour viols sur mineurs aux bracelets d’éloignement des hommes violents, de la levée du secret médical pour les médecins de femmes victimes de violences à la pénalisation du cyber-harcèlement en meute, de la création de l’agissement sexiste au travail à la multiplication des ordonnances de protection, les textes de loi ont profondément évolué.
De nouveaux dispositifs de signalements, applications, signalement des violences conjugales dans les centres commerciaux, numéros de téléphone ou plateformes de dialogue avec des policiers ont été créés par les pouvoirs publics et les associations. Dans le sillage de #metoo et suite au Grenelle des violences conjugales, la société tout entière se mobilise désormais pour sauver les vies de “Ne Rien Laisser Passer”.
I. Les droits des femmes face aux violences dans l’espace public
1. Harcèlement de rue – Code pénal, art. 621-1
La France est le premier pays au monde à verbaliser le harcèlement de rue. La loi du 3 août 2018 contre les violences sexuelles et sexistes, dite “loi Schiappa”, définit le harcèlement de rue comme un outrage sexiste, permettant une verbalisation immédiate. La contravention peut aller d’un montant de 90 euros à une amende de 750 euros, lorsque la peine est aggravée, le montant est porté à 1500 euros.
2. Cyber harcèlement en meute – Code pénal, art. 222-33-2-2
Depuis la loi du 3 août 2018, le fait de harceler en meute sur les réseaux sociaux, ou d’organiser des ”raids numériques” visant à s’acharner sur une même personne, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.
3. Arrêt de bus à la demande – Code des transports, art. L. 3115-3-1
La loi pour les mobilités du 24 décembre 2019 a permis d’entériner l’arrêt de bus à la demande, entre deux arrêts, dans le code des transports. Il permet de quitter un bus où l’on ne se sent pas en sécurité et d’être déposée plus près de chez soi la nuit. La généralisation du dispositif à toutes les lignes de bus est prévue d’ici 2022.
II. Les droits des femmes face aux violences conjugales
4. Violences psychologiques et suicide forcé – Code pénal, art. 222-33-2-1
Le Grenelle des violences conjugales a permis, grâce au travail de l’ancienne avocate et militante féministe Yael Mellul, de mieux répondre à des affaires de violences conjugales ayant conduit la femme à se suicider ou à tenter de se suicider, du fait de harcèlement moral.
5. Départ du domicile pour cause de violences conjugales – Nouvel article 8-2 de la loi de 1989
Grâce à la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite “loi Élan”, la solidarité qui existe entre époux et partenaires de PACS, tenus aux paiements des loyers du logement, peut tomber en cas de violences conjugales. Si vous quittez votre logement du fait de violences conjugales, vous n’êtes donc pas tenue de régler votre part des loyers.
6. Saisie des armes – Code de procédure pénale, art. 56, complété par le chapitre VI, art. 9, de la loi du 20 juillet 2020
Depuis le Grenelle des violences conjugales, les forces de l’ordre peuvent aller saisir les armes de la personne visée par une plainte pour violences conjugales, et ce y compris de leur initiative. C’est une avancée particulièrement importante puisque les armes constituent le premier mode opératoire des féminicides, loin devant les coups. La question figure d’ailleurs dans la grille d’évaluation du danger utilisée par les policiers et les gendarmes; c’est la première fois que la présence d’armes au domicile est prise en compte.
7. Bracelet anti-rapprochement – Code pénal, art. 132-45-1
Le Grenelle des violences conjugales a permis de compléter les moyens de protection à destination des victimes par un nouveau dispositif: le bracelet anti-rapprochement (BAR), qui permet de tenir l’ex conjoint violent à distance et de lancer l’alerte lorsque le conjoint ne respecte pas cette distance.
III Signaler les violences dont vous êtes victimes
8. Déposer plainte dans certains hôpitaux…
Le dépôt de plainte peut se faire dans un commissariat de police, une brigade de gendarmerie ou directement auprès du procureur.
– Sur place: vous pouvez vous rendre dans la brigade de gendarmerie ou le commissariat le plus proche du lieu d’infraction ou de votre domicile.
– Par courrier: vous pouvez écrire directement au procureur de la République, en envoyant une lettre sur papier libre au tribunal de grande instance du lieu de l’infraction ou du domicile de l’auteur de l’infraction.
Depuis le Grenelle des violences conjugales, il vous est également possible de porter plainte directement dans certains hôpitaux, grâce à des conventions conclues entre les départements, les parquets et les établissements hospitaliers.
9. … Avec des délais de prescription allongés – Code de procédure pénale, art. 7
Grâce à la loi du 3 août 2018, dite ”loi Schiappa”, les délais de prescription ont été allongés pour les victimes de viols sur mineure qui ont désormais jusqu’à trente ans après leur majorité (jusqu’à quarante-huit ans donc) pour déposer plainte et judiciariser le viol.
10. De nouveaux moyens de signalement sont à votre disposition pour signaler les violences dont vous êtes victimes
Au-delà des numéros d’urgence classiques, le Gouvernement a développé de nouveaux moyens de signalement à destination des victimes de violences conjugales et intrafamiliales. La plateforme de signalement en ligne du ministère de l’Intérieur arretonslesviolences.gouv.fr vous permet de dialoguer avec des policiers et gendarmes formés aux violences sexuelles et conjugales. Il s’agit d’un service gratuit, et vous n’êtes pas tenu de décliner votre identité. En cas d’urgence, un bouton de couleur vous permet de vous déconnecter à tout moment du tchat et d’effacer l’intégralité de la conversation.
Lors du confinement du printemps dernier, le Gouvernement a décidé d’ouvrir le 114, numéro d’urgence pour les personnes sourdes ou malentendantes victimes ou témoins d’une situation d’urgence, aux victimes de violences conjugales ou intrafamiliales qui seraient confinées avec l’auteur des violences et qui ne seraient pas en mesure de parler au téléphone.
Grâce à un partenariat entre le ministère de l’Intérieur et l’Ordre national des pharmaciens, vous pouvez désormais signaler les violences dont vous êtes victimes dans l’une des 22.000 officines en France métropolitaine ainsi qu’en outre-mer.
De nouveaux droits existent et ont été votés grâce à la mobilisation des politiques de tous bords, des associations, des professionnels, des experts, de la société civile… Il faut désormais les faire connaître, parce que si des droits existent mais que les femmes ne s’en saisissent pas, c’est comme si elles n’en avaient aucun. Parce qu’il est insupportable que des femmes subissent des violences sans être en mesure de connaître leurs droits. Et parce que savoir, c’est pouvoir.”
Pour retrouver l’article original : article huffington post
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