Décembre 2021
Il y a quelques mois, au détour d’une réunion de travail sur la gestion de la crise sanitaire avec le Premier ministre Jean Castex, ce dernier nous demanda à la fin de l’échange, qui s’était tenu dans une ambiance assez grave au regard du sujet, si nous avions des sujets à lui faire remonter. Je profitais alors de cette occasion pour lui partager deux préoccupations. La première touchait à la construction de la Métropole du Grand Paris et à la nécessité de reprendre le chemin de sa construction, notre région capitale ne pouvant rester plus longtemps à l’arrêt. La deuxième concernait le vélo et le fait que si nous continuions de développer l’utilisation du vélo, nous devions alors nous poser la question des opportunités économiques de ce développement pour nos entreprises et nos territoires. Très concrètement, je lui évoquai pour la première fois la nécessité de reconstruire une filière économique du vélo dans notre pays. Je n’imaginais pas alors dans quoi j’allais m’engager : une des missions les plus engageantes que j’ai eu à entreprendre depuis 2017 après le Grenelle des violences conjugales de 2019.
Rentrer dans ce sujet, c’est bien entendu parler des enjeux du développement du vélo dans notre pays, ce moyen de déplacement du quotidien qui peut représenter une alternative à la voiture pour des millions de nos concitoyens, dès lors qu’il y a des infrastructures, des vélos, des réseaux de réparateurs, etc. En effet, aujourd’hui 40% des déplacements effectués en voiture le sont pour des distances de moins de 3 kilomètres. Les marges de progression du vélo sont considérables.
Rentrer dans ce sujet, c’est travailler sur nos politiques environnementales et sur les outils que nous pouvons mettre en place pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et sortir de la société de l’autosolisme. C’est aussi un moyen de déplacement qui peut nous permettre d’apporter des solutions concrètes à la crise énergétique que nous connaissons et à la hausse continue des prix de l’énergie que nous subissons et qui pénalise grand nombre de nos concitoyens. Face à la période que nous vivons, le vélo est une solution qui doit être regardée de près et avec intelligence. D’autres pays avant nous, je pense bien entendu au Pays-Bas et au Danemark, ont développé ce moyen de transport dès les années 1970 du fait des conséquences des deux chocs pétroliers de l’époque.
Rentrer dans le sujet du vélo, c’est parler environnement, c’est aussi parler santé et bien-être, ce mode de déplacement ayant des vertus qui ne sont plus à démontrer pour notre santé. Si nous tenons nos engagements de passer de 3% à 9% la part des déplacements à vélo d’ici 2024, ce qui nous demanderait de grandement accélérer nos efforts, les économies annuelles en matière de dépenses de santé sont estimées à 5 milliards d’euros.
Parler vélo, c’est aussi parler économie, c’est entrer dans la vie de nos territoires, dans l’histoire de l’industrie française. C’est observer les erreurs que notre pays a commises depuis 50 ans en pensant alors que la France n’avait plus besoin de construire sur place ce dont elle avait besoin. L’industrie du vélo, comme d’autres, fut frappée de plein fouet. Cette vision politique a entrainé l’affaiblissement et l’appauvrissement d’un grand nombre de nos territoires. A la fin des années 1970 notre pays était un des leaders mondiaux de l’industrie du vélo. Tout s’est écroulé en l’espace de quelques années au détriment d’une dépendance quasi-totale envers les pays asiatiques.
En France aujourd’hui, nous savons construire un sous-marin nucléaire ou un rafale, mais nous ne savons plus faire un dérailleur de vélo ou un cadre. Est-ce acceptable? Non. Qui plus est lorsque cette perte de savoir-faire entraîne un retard dans l’accès au vélo des Français et des Françaises et au déploiement d’une politique environnementale et de santé majeure. Qui plus est lorsque cette perte de savoir-faire ralentit un secteur économique tout entier. Au moment où nous relançons l’industrialisation de notre pays, la question du développement de l’industrie du vélo s’impose. Elle se pose avec une acuité encore plus forte au regard de la pratique et de la demande des Français qui explosent.
Structurer la filière vélo, étudier les pistes qui doivent nous permettre demain de revitaliser ce secteur c’est bien entendu toucher du doigt le sujet de la réindustrialisation de notre pays. Des rencontres et des déplacements que je fais en ce moment, deux convictions apparaissent. D’autres suivront à n’en pas douter.
D’abord, nous ne recréerons pas ce qui existait autrefois : nous devons absolument bien cibler nos segments d’activités et réussir à nous déployer sur les marchés technologiques du milieu de gamme ou de la haute gamme. Les révolutions du vélo à assistance électrique, du vélo-cargo et des objets connectés (le vélo l’est de plus en plus) représentent ici de réelles opportunités pour nos industriels.
D’autre part, nous devons développer des ponts, des partenariats entre les différents secteurs industriels et économiques, sortir de nos logiques d’assignation à résidence et de clivage mortifères. Concrètement, les acteurs du vélo, de l’automobile, de l’aéronautique, de l’électronique, de la chaudronnerie, de la french tech doivent travailler ensemble.
Bien entendu la filière vélo ne se résume pas à la seule question industrielle. La filière porte aussi sur les enjeux économiques que représente le développement du vélo pour nos services. Je pense en particulier au secteur de la réparation et de l’entretien, au vélo en libre-service, au leasing, au développement des applications numériques qui facilitent l’utilisation du vélo. C’est aussi parler développement du tourisme à vélo et des opportunités pour nos territoires. C’est enfin parler des infrastructures cyclables, du déploiement des pistes dédiées et des lieux de stationnements, qui sont une condition indispensable au bon développement de la pratique du vélo en France et donc de son secteur économique. L’enjeu en termes d’emplois est par ailleurs important dans un secteur très attractif. Je n’irai à ce stade pas plus loin dans la présentation de mes travaux qui vont se dérouler jusqu’au début du mois de janvier. Je présenterai mon rapport fin janvier et vous l’exposerai alors dans les moindres détails.
Si vous souhaitez être informé de l’évolution de cette mission parlementaire sur la filière économique du vélo, je vous invite à vous inscrire ci dessous. Vous recevrez des lettres d’informations et le rapport lorsqu’il sera finalisé en janvier :