Pourquoi portez-vous une proposition de loi consistant notamment à remplacer la Métropole par un pôle métropolitain ?
Nous sommes tous métropolitains. Il n’y a pas lieu, selon moi, d’opposer ceux qui sont pour et ceux qui sont contre la Métropole. La seule question qui vaut est celle de savoir comment l’on construit la Métropole, pour qu’elle soit efficace et réussisse. Nous croyons au fait métropolitain, à la nécessité de le structurer, parce qu’aujourd’hui, nous voyons que dans nos territoires, les sujets de la transition écologique et numériques, de lutte contre les pollutions, les questions de transport, de logement ou d’attractivité, ne peuvent être résolus par les communes ou même les départements seuls. Je mets à part la ville de Paris, qui est en quelque sorte une ville Etat, avec plus de 2 millions d’habitants et plus de 50.000 agents. Il faut donc avancer sur le chemin de l’intercommunalité et de la construction de la Métropole.
La Métropole ne joue pas son rôle, selon vous ?
J’ai personnellement beaucoup déchanté depuis la création de la Métropole, à laquelle j’ai d’abord cru. On a créé une assemblée de maires qui ne parvient pas à résoudre les sujets que je viens d’évoquer, et qui se trouve dans une situation de blocage, d’invisibilité, d’imperceptibilité pour les citoyens, et de confrontation renforcée entre Paris et la Petite couronne. C’est ce qui nous a amené à formuler cette proposition de loi. Elle vise à rediscuter de la construction métropolitaine, en procédant par étapes, pour aboutir, in fine, vers un périmètre régional, qui est le bon selon nous, compte tenu de la taille de la Région Ile-de-France, relativement réduite.
Quelle serait la première étape de cette réforme ?
Elle passe tout d’abord par la consolidation des Territoires, alors que les élus ont pris la mesure de ce qu’ils peuvent apporter en termes de politiques publiques. J’aime rappeler que Grand Orly Seine Bièvre compte 100.000 habitants de plus que Nantes Métropole. Il est normal et logique de consolider la fiscalité et les moyens de établissements publics territoriaux (EPT) en les transformant en établissements publics de coopération intercommunale de droit commun, dotés d’une fiscalité propre. Notre réforme passe aussi par la création d’un pôle métropolitain, structure plus souple, de projet, la Métropole devant se construire par projet.
Remplacer la Métropole par un pôle métropolitain dénué de fiscalité propre, n’est-ce pas renoncer à l’objectif de rééquilibrage fixé notamment par loi de 2010 relative au Grand Paris ?
Ce sont de mon point de vue deux chantiers différents. Il y a d’un côté celui de la gouvernance de la Métropole, et de l’autre côté celui de la justice fiscale et de la lutte contre les inégalités. Aujourd’hui, la Métropole ne corrige en rien les disparités existantes. Il faut que l’on se remette autour de la table pour étudier comment réduire ces inégalités fiscales en Ile-de-France. De nombreux dispositifs existent, dont personne n’est capable aujourd’hui de faire la synthèse ni de mesurer précisément les effets. Lorsque l’on a construit la proposition de loi, certains élus, notamment de Seine-Saint-Denis, nous ont dit que notre texte allait dans le bon sens, ajoutant que nous devions néanmoins étudier également la correction des inégalités financières et fiscales entre collectivités franciliennes. Ils ont raison. Mais cela passe par des dispositifs dédiés.
Quel visage aurait le pôle métropolitain que vous appelez de vos vœux ?
Ce pôle métropolitain doit nous permettre d’avancer plus vite. Il ne rassemblerait pas 209 élus, comme la Métropole, mais une quinzaine d’élus. Ce ne serait pas un conseil des maires, ne traduisant que la vision des communes. Il s’agirait d’une structure efficace dans sa gouvernance, qui représenterait les Territoires, les Départements et la Région, ce qui permettra de croiser les politiques publiques des uns et des autres, rôle que ne joue pas la Métropole aujourd’hui. La Métropole est une assemblée de maires où chacun défend les intérêts de sa commune. On a coutume de dire, à l’Assemblée, qu’elle joue le rôle de l’ancienne réserve parlementaire, qui distribuait aux uns et aux autres des crédits, en forme de saupoudrage. Ce pôle métropolitain pourrait, par exemple, être chargé de la mise en œuvre de la Zone à faibles émissions (ZFE), qui ne concerne pas que le périmètre de la Métropole mais l’ensemble de la Région. Ce pôle pourrait également prendre en charge les questions de transition écologique, ou porter le SCoT et le plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement (PMHH).
Quel rôle doit jouer Paris dans ce débat ?
La ville de Paris fait régulièrement connaître son attachement à la Métropole, et son opposition au pôle métropolitain que nous proposons. Mais s’il est vrai que la Métropole ne peut se faire sans ou contre Paris, elle ne peut pas non plus se faire sans ou contre la Petite couronne. A un moment donné, la maire de Paris devra parler avec les présidents de Territoire, les présidents de Départements, et la présidente de la Région. Et ce n’est pas le cas aujourd’hui. Le Grand Paris se fera avec l’ensemble des acteurs. Cela se fera avec les uns et les autres. En s’écoutant. Je pense par exemple que la mairie de Paris, en matière de transition énergétique, a un train d’avance par rapport à l’ensemble des communes de petite couronne.
Où en est votre projet de loi ?
Il a été déposé à l’Assemblée nationale. Il faut à présent qu’il soit inscrit à l’ordre du jour, ce qui suppose, à l’évidence qu’il soit soutenu par le gouvernement. J’ai le sentiment que du côté du gouvernement, on n’a pas de vision de ce que doit être le Grand Paris. Ce qui constitue un problème. Il faut que l’Etat travaille pour élaborer une vision cohérente de l’Ile-de-France, qui représente 20% de la population et plus de 30% du PIB français. Nous bénéficions du plus grand chantier public européen avec le Grand Paris express. Il n’est pas possible que l’Etat reste sans vision d’avenir pour cette région-Capitale. Nous avons déposé cette proposition de loi, signée par l’ensemble des parlementaires LREM franciliens, pour remuer le cocotier et faire avancer le débat. Il faut un haut-commissaire au Grand Paris, ou un ministre dédié, afin d’en finir avec les vaines querelles et les réflexes défensifs des uns et des autres.
Espérez-vous que votre projet de loi soit examiné avant les prochaines élections présidentielles ?
Absolument. J’estime que nous sommes dans une situation d’urgence sur cette question. Si nous ne résolvons pas ce problème avant les prochaines élections présidentielles, nous nous retrouverons au lendemain de ces élections avec d’autres priorités, liées à la relance, à la gestion de la dette, à celle de notre modèle social, puis nous nous approcherons des Jeux olympiques… Nous ne pouvons pas attendre 2027 pour lever la situation de blocage institutionnel dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Hélas, chacun défend aujourd’hui sa position, sa collectivité. Il faut sortir des querelles d’ego.
Cette tribune est en ligne sur le site du journal du Grand Paris.