Retrouvez-ci dessous la tribune dans le journal L’Opinion du groupe Renaissance pour la journée internationale du droit à l’avortement.
Toutes les neuf minutes à travers le monde, une femme succombe d’un avortement clandestin.
Le 24 juin dernier, la Cour suprême des Etats-Unis annulait l’arrêt “Roe v. Wade”. Les juges n’ont alors pas seulement mis à bas la protection constitutionnelle de l’accès à l’interruption volontaire de grossesse, ils ont réduit à néant tout un pan de la liberté des femmes à disposer de leur corps. Cet acte politique, bien plus que juridique, venait parachever des décennies de nominations patientes et coordonnées de juges conservateurs à la cour. Vendredi dernier en Arizona, la décision de la juge du comté de Pima réactive les textes en vigueur en 1864 et 1901 : les soignants risqueront jusqu’à cinq ans de prison et les femmes ayant survécu au viol et à l’inceste seront forcées de mener à terme leurs grossesses.
Il serait naïf et surtout dangereux de considérer que de telles régressions seraient un phénomène contenu de l’autre côté de l’Atlantique. Au cœur de l’Union européenne, les mêmes forces conservatrices sont à l’œuvre afin de priver les femmes de leurs droits et d’entraver leur liberté. Et elles progressent. En Pologne, le gouvernement a acté en 2021 la restriction de l’accès à l’IVG en le conditionnant à l’existence d’un viol ou d’un danger pour la vie de la femme souhaitant y recourir. En Hongrie, le gouvernement veut obliger les femmes à écouter les battements de cœur du fœtus avant d’avorter. En Slovaquie, près de onze propositions de loi ont été déposées en l’espace de deux ans afin de restreindre l’accès à l’avortement ; et en Italie, alors que le parti post-fasciste est arrivé nettement en tête des législatives, celle qui revendique l’héritage de Benito Mussolini considère l’avortement comme « un crime contre la race italienne».
Dans cette Assemblée nationale nouvelle, nous ne sommes pas moins en reste. D’un côté de l’hémicycle, on a vu naître la proposition de dérembourser l’IVG, qualifiée d’acte de « confort » ; certains de ces nouveaux députés considèrent l’avortement comme « un crime contre l’humanité ». De l’autre côté, le camp qui se revendique comme « le plus progressiste » en vient, par réflexe clanique, à excuser ou minorer des violences conjugales. L’auteur des faits n’étant même pas exclu du parti.
Considérer comme acquis les droits des femmes serait commettre une faute et faire courir un risque aux générations futures. Nul ne peut raisonnablement considérer que la France serait par principe protégée aujourd’hui, comme demain. Et quand une majorité existe pour agir, elle a la responsabilité politique de s’en saisir.
Dès le 30 juin, nous, députés du groupe Renaissance avons déposé une proposition de loi visant à inscrire la protection de l’accès à l’IVG dans notre Constitution. Il s’agira du premier texte que nous examinerons dans le cadre de notre niche parlementaire fin novembre. Au-delà du seul renforcement juridique, il s’agit d’un signal politique fort et clair que nous envoyons à l’Europe et au monde. Bien plus qu’une norme juridique, notre constitution porte en elle les valeurs qui animent notre nation et qui honorent la France comme digne héritière des Lumières. C’est un message que nous devons à toutes les femmes qui se battent pour leurs droits, à celles qui dansent en Iran cheveux au vent à la barbe de l’obscurantisme religieux pour exercer leur liberté, à celles qui résistent en Afghanistan à la répression impitoyable du régime taliban.
En cette journée internationale pour le droit à l’avortement, nous déclarons aux ennemis des droits des femmes, aux adversaires de la liberté, aux contestataires du progrès : nous sommes là. Aujourd’hui pour protéger demain. Et demain, pour continuer à faire progresser nos droits.