Lire la tribune sur le site de l’Humanité
Face au « backlash » et au trumpisme, n’abandonnons pas la diplomatie féministe française
Nous n’abandonnerons pas la diplomatie féministe de la France. À l’heure où le « backlash » contre les droits des femmes et l’égalité de genre sévit partout dans le monde et où son chef de file, Donald Trump, reprend le pouvoir à la Maison Blanche, nous appelons les décideurs et décideuses politiques en France à prendre leurs responsabilités, à l’Assemblée nationale, au Sénat et au sein du gouvernement.
Plus que jamais, nous avons besoin d’une diplomatie féministe française forte, assumée, et dotées de moyens financiers conséquents.
En 2023, la France a pris une décision historique : intégrer l’avortement dans sa constitution. C’est le fruit de décennies de mobilisations féministes et de l’engagement de parlementaires, aussi bien à l’assemblée nationale qu’au sénat. C’est un bel exemple de travail transpartisan au service d’une grande cause : les droits des femmes.
Cette constitutionnalisation représente une avancée formidable pour les droits des femmes en France. C’est aussi un signal envoyé aux femmes du monde entier et une victoire retentissante face aux mouvements conservateurs. En 2023, déjà, cette décision était une réponse forte au « backlash » contre les droits des femmes et notamment à l’annulation de l’arrêt Roe vs Wade aux États-Unis, qui venait de mettre un terme au droit fédéral à l’avortement.
Un an plus tard, cette décision historique résonne encore plus fort, avec le retour tonitruant de Donald Trump à la Maison Blanche, soutenu par les géants de la Big Tech et des responsables politiques réactionnaires, populistes, anti-féministes et xénophobes du monde entier, à l’instar de Giorgia Meloni, Javier Milei, Nigel Farage, entre autres. Cette coalition hétéroclite partage un agenda commun contre les droits des femmes. Partout, ses adeptes remettent en cause des droits durement acquis, à contre-courant des aspirations sociales grandissantes en faveur de l’égalité et de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
Dans la continuité du travail transpartisan qui a conduit à la constitutionnalisation de l’IVG, nous appelons à une mobilisation générale pour défendre les droits des femmes à l’international. Depuis 2019, la France s’est engagée dans une « diplomatie féministe », avec l’adoption de nouvelles ambitions à l’international et la création d’un fonds de soutien aux organisations féministes des Sud. Mais ces engagements n’auront aucun impact s’ils ne sont pas financés durablement.
Or, aujourd’hui, nous faisons face à des coupes historiques dans le budget de l’aide publique au développement française. Une coupe de plus de 2 milliards d’euros, soit un niveau jamais vu, est prévue dans le budget 2025. Affaiblir l’APD dans ces proportions, c’est se couper de la possibilité de faire avancer les droits des femmes partout dans le monde. C’est se priver d’alliées indispensables pour défendre la démocratie, l’État de droit, la liberté des femmes à disposer de leur corps. C’est risquer notre crédibilité sur la scène internationale, quelques mois avant d’accueillir en France la quatrième conférence mondiale sur les politiques étrangères féministes.
Le 30 janvier, 14 parlementaires vont débattre en commission mixte paritaire pour trouver un compromis sur un texte final. Nous appelons solennellement nos collègues ainsi que le gouvernement à tout mettre en œuvre pour limiter autant que possible les coupes budgétaires dans l’aide publiquement au développement.
Ne laissons pas la France connaître le même destin que ses voisins européens, ne cédons pas sous la pression de discours réactionnaires qui voudraient voir disparaître les politiques de solidarité internationale. Une autre voix, et une autre voie, sont possibles pour la France sur la scène internationale.
Signataires :
– Marie-Noëlle Battistel, députée du groupe Socialistes et apparentés
– Sophie Briante Guillemont, sénatrice du groupe Rassemblement Démocratique et Social Européen
– Julie Delpech, députée du groupe Ensemble Pour la République
– Marie-Charlotte Garin, députée du groupe Ecologiste et Social
– Guillaume Gouffier-Valente, député du groupe Ensemble Pour la République
– Elise Leboucher, députée du groupe La France Insoumise
– Mathilde Ollivier, sénatrice du groupe Ecologiste – Solidarité et territoire
– Mélanie Vogel, sénatrice du groupe Ecologiste – Solidarité et territoire
– Pierre-Yves Cadalen, député du groupe LFI
– Céline Thiébault-Martinez, députée du groupe Socialistes et apparentés
– Nadège Abomangoli, députée du groupe LFI
– Fatiha Keloua Hachi, députée du groupe Socialistes et apparentés
– Dominique Vérien, sénatrice du groupe Union Centriste