Nombre de déclarations, de commentaires, d’analyses qui ont été faits après les résultats des élections législatives laissaient à penser que notre pays serait devenu ingouvernable. A titre personnel, je ne le pense pas. Au mois d’avril, les Françaises et les Français ont réélu Emmanuel Macron comme Président de la République faisant ainsi le choix de la continuité pour notre pays. Une première depuis plusieurs décennies. Quelques semaines plus tard, ils ont à nouveau donné au Président de la République une majorité pour gouverner notre pays. Cette majorité, ils l’ont voulue relative afin que la représentativité des opinions politiques soit plus forte à l’Assemblée et que notre majorité parlementaire soit plus à l’écoute des autres sensibilités politiques, des partenaires sociaux, des territoires. Le message a été entendu. Nous allons davantage travailler avec les groupes politiques de l’arc républicain et développer les projets législatifs transpartisans. Nous allons aussi renforcer nos échanges avec les forces vives de notre pays et de nos territoires.
Depuis, le pays est-il bloqué ? Non. La session extraordinaire de ce mois de juillet nous a démontré que nos institutions fonctionnaient parfaitement et que notre capacité à agir pour les Françaises et les Français était intacte. Au cours des dernières semaines, nous avons eu à légiférer en urgence pour préparer la gestion de sortie de la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19, pour protéger le pouvoir d’achat des Français et le dynamisme de notre économie, pour renforcer nos outils dans la lutte contre les contenus à caractère terroriste sur Internet. Nous avons par ailleurs créé des droits nouveaux attendus depuis plusieurs années comme par exemple la dé-conjugalisation de l’allocation adulte handicapé. Par ailleurs, la méthode de construction de la loi évolue. Une méthode qui va laisser plus de place à l’évaluation, au contrôle, à la co-construction et à la négociation. C’est dans cet esprit que le Gouvernement a décidé de commencer nos travaux en octobre. Pour la première fois depuis plus de vingt ans nous n’aurons pas de session extraordinaire au mois de septembre. Ce temps sera consacré à la préparation du budget pour 2023 et des prochains textes législatifs. Nous allons revoir de manière radicale notre mode de fonctionnement afin de légiférer moins mais mieux, de légiférer quand le besoin est bien réel et non quand l’actualité l’impose comme contrefeu médiatique. Nous devons sortir de cet impératif légistique guidé par l’émotion. La loi n’est pas un outil de communication.
Nos institutions ne sont pas bloquées mais la France ne va pas bien. Ne nous voilons pas la face. C’est ce qui ressort des années que nous venons de vivre et des résultats des dernières élections. Un pays où trois candidats populistes, dont deux d’extrême-droite, se retrouvent respectivement deuxième, troisième et quatrième du premier tour de l’élection présidentielle est un signal fort et inquiétant. Un pays où les élections législatives donnent pour deuxième et troisième forces à l’Assemblée nationale les principaux partis d’extrême-droite et d’extrême-gauche n’est pas un pays qui va bien. Aujourd’hui, le Rassemblement national de Marine Le Pen compte 89 députés à l’Assemblée nationale et la France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon, 75. Non, la France ne va pas bien. A travers ces élections, une partie des Français ont exprimé leur désarroi, leurs difficultés du quotidien, leurs craintes vis-à-vis du monde dans lequel nous vivons mais surtout, celui dans lequel nous aurons à vivre. A ces inquiétudes de la vie réelle nous devons sans relâche apporter des solutions concrètes et efficaces. Nous devons continuer de lutter contre les inégalités sociales et de destin. Nous devons soutenir la relance de notre économie et accélérer la transition écologique. Nous devons aussi avoir en tête la réconciliation de nos territoires.
Cependant, nous ne devons être ni dupes ni lâches quant à ce qui se cache également derrière ces votes. A travers le vote pour l’extrême-droite, c’est le repli sur soi, la peur et le rejet de l’autre, la remise en question de la séparation des pouvoirs, le racisme, la xénophobie, l’antisémitisme, la misogynie, l’homophobie qu’une partie de nos concitoyens ont exprimés. Le Rassemblement national demeure le Front national. Et nous devons absolument combattre son idéologie sans relâche, avec la plus grande détermination. Nous ne devons rien laisser passer. A travers le vote pour l’extrême-gauche radicale, c’est le rejet de nos institutions, de la démocratie représentative et parlementaire, de la négociation avec les partenaires sociaux qui s’exprime aussi. C’est le vote pour une gauche qui, pour servir ses intérêts politiques, préfère de manière cynique, maintenir les personnes dans la précarité pour faire monter les tensions sociales plutôt que de mettre en place des politiques d’émancipation économique et sociale. Cette idéologie radicale et révolutionnaire, nous devons aussi la combattre.
Par ailleurs, nous ne devons plus être naïfs sur le fait que l’extrême droite et l’extrême gauche se rejoignent sur leurs visions nationalistes, anti-europénnes et anti-parlementaristes. Sur leurs méthodes militantes également, basées sur la diffusion des rumeurs, des théories complotistes et des fausses informations, sur l’instrumentalisation et l’agitation des colères. La jonction entre une partie des électeurs d’extrême-droite et une partie des électeurs d’extrême-gauche nous l’avons d’ailleurs pleinement observée lors des dernières élections législatives sur certains territoires. Elle est une véritable alerte démocratique pour notre pays pour les années à venir. Nous ne devons plus fermer les yeux.
Le quinquennat et la législature qui s’ouvrent vont être une période politique intense durant laquelle il n’appartiendra qu’à chacune et chacun d’entre nous de s’engager pour renforcer notre démocratie et participer à la construction de la société dans laquelle nous voulons vivre, à la société que nous voulons pour nos enfants et nos petits-enfants. Je compte sur votre engagement. Comptez sur le mien, sans relâche.